NECT (combinaison thérapeutique d’éflornithine et de nifurtimox), le premier traitement contre la trypanosomiase humaine africaine (THA) ou maladie du sommeil à être mis au point depuis 25 ans, est maintenant disponible. Les pays endémiques ont, d’ores et déjà, commencé à passer commande pour des kits de traitement auprès de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). Développé par Drugs for Neglected Diseases initiative (DNDi) et ses partenaires, NECT coûte deux fois moins cher que les traitements qui l’ont précédé. De plus, il permet d’alléger de façon significative la charge de travail pour le personnel de santé. Comme cela a été annoncé aujourd’hui, lors du Conseil scientifique international pour la recherche et la lutte contre la trypanosomiase à Kampala, en Ouganda.
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“Grâce à un partenariat novateur et à l’engagement sans précédent des soignants, des chercheurs et des spécialistes provenant des pays endémiques ainsi que des milieux pharmaceutiques et académiques, un nouveau traitement est maintenant disponible pour lutter contre l’une des maladies les plus négligées d’Afrique. Ce nouvel outil thérapeutique est, non seulement mieux adapté aux régions éloignées et difficiles d’accès, mais il permet également de réduire les coûts des médicaments, de l’hospitalisation et du transport » indique le Dr. Bernard Pécoul, Directeur Exécutif de DNDi.
La maladie du sommeil menace 60 millions de personnes dans 36 pays en Afrique subsaharienne. Transmise par la mouche tsé-tsé, cette maladie tropicale est mortelle lorsqu’elle n’est pas soignée. NECT représente une nouvelle option pour la prise en charge des patients au stade avancé (stade 2) de la THA. A ce stade, la maladie affecte le système nerveux central provoquant des désordres neuro-psychiatiques, des convulsions, des troubles du sommeil et conduit au coma et à la mort en l’absence de traitement.
En mai 2009, NECT a été ajouté à la liste des médicaments essentiels de l’OMS au titre de traitement contre la maladie du sommeil.
La combinaison thérapeutique NECT simplifie le traitement de la maladie en permettant l’administration de nifurtimox par voie orale et d’éflornithine par voie intraveineuse. Un nombre réduit de perfusions d’éflornithine (14 au lieu de 56 pour la monothérapie) et une durée d’hospitalisation raccourcie à 10 jours (contre 14) représentent un avantage non négligeable pour les patients. En outre, NECT ne nécessite pas de prise en charge nocturne – les deux injections quotidiennes pouvant être effectuées durant la journée. Cela facilite le travail du personnel médical et rend le traitement mieux adapté aux régions reculées et souvent pauvres où la THA sévit.
Auparavant, Il n’existait que deux options de traitement : 1) le mélarsoprol, un médicament à base d’arsenic très répandu mais douloureux et toxique ; près de 5% des patients succombaient à ce traitement; et 2) l’éflornithine, un médicament plus récent, mais dont l’injection nécessite des perfusions d’une heure chacune, à intervalles de 6 heures et ce, durant 2 semaines. La monothérapie d’éflornithine est mieux tolérée et plus efficace que le mélarsoprol, mais elle est compliquée et longue à administrer, demande une assistance médicale de jour comme de nuit. De plus, les médicaments et le matériel médical nécessaires coûtent chers. Pour ces raisons, et malgré sa toxicité, le mélarsoprol continue d’être administré à de nombreux patients en Afrique.
“En tant que médecin, on ne traite pas les patients pour les voir mourir, on les traite pour les voir rentrer chez eux », déclare le Dr. Constantin Miaka Mia Bilenge, Conseiller Nationale de la Santé en République démocratique du Congo (RDC). « Ce nouveau traitement combiné est plus facile à utiliser que l’éflornithine en monothérapie. Il est source d’espoir pour les patients comme pour les praticiens, en particulier dans des pays comme le nôtre où les infrastructures sont déficientes »
Traiter des patients avec la nouvelle association de médicaments revient deux fois moins cher que le traitement d’éflornithine seule. L’agencement des kits NECT est tel qu’il permet de réduire le coût des médicaments, du matériel médical et du transport à 223 euros par patient – soit la moitié des 447 euros que coûtait la monothérapie d’éflornithine. Et puisque le nouveau traitement requiert moins de perfusions et s’étale sur une durée plus courte, son impact est également bénéfique sur la charge de travail du personnel de santé et les frais d’hospitalisation.
“L’arrivée de NECT va améliorer la prise en charge des malades et faire une grande différence en terme de logistique, d’hospitalisation et de coût” indique le Dr. Pere Simarro, Chef du Programme de lutte et de surveillance de la maladie du sommeil à l’OMS. « Pour soutenir les pays touchés, l’OMS mettra à disposition gratuitement des kits contenant le nouveau traitement ainsi que tout le matériel médical nécessaire pour traiter les patients dans des zones reculées ». L’OMS a pris des mesures pour préparer l’arrivée de NECT et pour s’assurer que le personnel de santé dispose d’une formation adéquate. L’OMS a conçu le kit de traitement NECT en collaboration avec les services logistiques de Médecins Sans Frontières (MSF).
Les kits NECT seront fournis gracieusement par l’OMS aux pays demandeurs1. Cette mesure devrait motiver les programmes nationaux de lutte contre la maladie du sommeil à renoncer à l’usage du douloureux et toxique traitement de mélarsoprol en faveur du nouveau traitement mieux toléré.
Jacqueline Tong, ‘Senior advocacy officer’ auprès de MSF ajoute: “Nous avons perdu trop de patients à cause de médicaments anciens, dépassés et toxiques tels que le mélarsoprol. Nous avions un besoin urgent d’un tel nouveau traitement, plus sûr et plus simple pour nous permettre d’arracher des vies humaines aux griffes de cette maladie mortelle »
Un kit NECT contient quatre traitements complets, au lieu de deux dans le kit de monothérapie d’éflornithine, et ne pèse que 36kg. De plus, le volume d’un traitement individuel est moins important (37,5 dm3 au lieu de 85 dm3). Plus légers et moins volumineux, les kits sont plus faciles et moins coûteux à transporter, surtout lorsqu’il s’agit d’atteindre des régions très reculées, comme c’est le cas en RDC.
Le développement de NECT est le fruit de six ans de collaboration entre plusieurs partenaires : DNDi – avec un rôle de coordination -, Médecins Sans Frontières, Epicentre, la Plateforme THA, l’Institut Tropical Suisse, les programmes nationaux de lutte contre la THA en RDC et en République du Congo. Le projet a bénéficié du soutien de l’OMS et des dons de médicaments de sanofi-aventis et de Bayer Schering Pharma AG.
Pour de plus amples informations, merci de contacter : Samantha Bolton à Kampala, sbolton@dndi.org ou +256 78 44 55 381, Eva van Beek à Genève au +41 (0)79 882 44 70. Vidéos et photos sont disponibles sur www.dndi.org
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Drugs for Neglected Diseases initiative (initiative Médicaments contre les Maladies Négligées) est un partenariat indépendant et à but non lucratif engagé dans la recherche et le développement de traitements innovants et plus efficaces contre les maladies négligées comme le paludisme, la leishmaniose, la maladie du sommeil ou la maladie de Chagas. Fondé en 2003 par l’Institut Pasteur, Médecins Sans Frontières et quatre instituts de recherche de pays endémiques, DNDi a pour mission de répondre aux besoins des patients atteints par les maladies les plus négligées. Travaillant en partenariat avec l’industrie et les milieux académiques, DNDi a constitué le plus important portefeuille de projets de recherche et de développement jamais établi pour les maladies provoquées par des kinétoplastides – portefeuille comptant actuellement trois projets en phase post-enregistrement, neuf projets en phase clinique et quatre en phase préclinique ainsi qu’une large variété d’activités de découverte. En 2007 et 2008, DNDi a lancé ses deux premiers traitements : l’« ASAQ », un antipaludique à dose fixe, et l’ « ASMQ ». Cette année, NECT (combinaison thérapeutique d’éflornithine et de nifurtimox), un nouveau traitement sûr et efficace contre la maladie du sommeil, a été inclus dans la liste des médicaments essentiels de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). Pour plus d’information : www.dndi.org
1) Depuis le début du 20e siècle, les médicaments et les traitements contre la maladie du sommeil, la tuberculose et la lèpre sont fournis gratuitement en Afrique. Mais comme la maladie du sommeil touche les plus pauvres et que son traitement nécessite une hospitalisation, les médicaments ne peuvent pas être achetés par les particuliers en officine. Leur distribution est gérée par des programmes nationaux spécialisés.